Les Grands Blancs de False Bay manquent à l’appel / False Bay’s Great Whites Are Missing

“For this photo I was dropping down several meters away when the shark noticed me and took a very quick turn swimming right next to me before darting off towards a sea lion which shortly thereafter bit the sharks tail sending it scurrying into the distance…”© William Winram

False Bay, près de Cape Town en Afrique du Sud, est un spot mondialement connu pour ceux qui veulent aller à la rencontre des grands requins blancs (Carcharodon carcharias). Cela étant, Les spécialistes de Shark Spotters, un programme de surveillance et de conservation des requins mené dans la région depuis 2004, ont fait savoir qu’ils n’avaient enregistré entre janvier 2018 et aout 2019 strictement aucune observation de grand blanc dans la baie. Et ce même durant les mois d’été – de janvier à avril –, lorsque les poissons se font nombreux à proximité des côtes et qu’ils attirent de fait les squales. Et les scientifiques ne peuvent émettre que des hypothèses.

De 205 observations par an à … zéro!

Entre 2010 et 2016, les observateurs ont répertorié en moyenne 205 observations annuelles de requins blancs au large des plages, concentrées sur le printemps et l’été. Bien que l’on sache que l’espèce est migratoire – les femelles sont capables de migrer sur plusieurs milliers de kilomètres -, en 2018, le nombre d’observations a chuté à 50 pour atteindre finalement, en 2019, le chiffre dramatique de zéro. 

L’une des attractions touristiques de la région consiste en des sorties en bateau ou des plongées en cage pour observer les grands blancs. Mais les opérateurs n’ont pas eu un seul requin à observer cette année. Pourtant, lors de ces expériences, les clients pouvaient observer plusieurs individus et jusqu’à 30 prédations de phoques par jour….

Aucun signe de prédation non plus sur les carcasses de baleines échouées, retirées régulièrement des côtes par les services municipaux.

Alors, quelles hypothèses ?

Aucune des hypothèses avancées par les scientifiques n’est pour l’instant privilégiée. L’une d’entre elles serait les attaques d’orques, de plus en plus fréquentes sur les grands blancs de la région. Depuis plusieurs années, un nouveau groupe d’orques venu s’installer dans la baie aurait en effet développé un goût tout particulier pour… le foie de grand requin blanc

Hypothèse numéro 1 : les orques ?

En mai dernier, pas moins de cinq carcasses de requins ont été retrouvées sur les côtes de Betty’s Bay, petite ville située elle aussi dans les environs du Cap. Intacts, seul le foie de ces requins avait été dévoré avec une précision chirurgicale. « La South African Shark Conservancy a procédé à des nécropsies et a déterminé que des requins avaient été ciblés par des orques », écrivait à l’époque Shark Spotters sur sa page Facebook. Deux orques en particulier, Port et Starboard, avaient été tenues pour responsables du massacre. Qualifiées de « bandits itinérants » par les spécialistes, elles avaient été observées à cette même période rôdant dans la baie. Leur hostilité pourrait avoir fait fuir les grands blancs de la zone, un comportement déjà observé face à la menace des orques en Australie et en Californie.

Hypothèse numéro 2 : les hommes ?

Les activités humaines se multiplient, avec l’augmentation de la population. La surpêche, qui équivaut à un manque de nourriture pour les requins, mais aussi une menace importante à leur survie, est une cause évidente. La pollution des océans est malheureusement un problème mondial. False Bay n’échappe pas au développement touristique qui pourrait aussi avoir joué un rôle dans la désertion des requins, sans toutefois expliquer la baisse brutale de leur nombre. Pour l’heure, le mystère reste donc entier. D’autant qu’à présent, une autre inconnue vient s’ajouter au tableau : les scientifiques ignorent encore quelles vont être les conséquences de l’absence des grands requins blancs sur l’écosystème.

English Version : False Bay’s Great Whites Are Missing

Sightings of white sharks (Carcharodon carcharias) have crashed in 2019 in False Bay near Cape Town, South Africa—one of the best-known hot spots of the white sharks in the world.  Shark Spotters, a local charity that monitors the city’s beaches daily and warns swimmers if sharks are near, has not recorded a single confirmed white shark sighting from Juanary 2018 to August 2019—not even during the summer months, when the fish usually come close to shore. And scientists aren’t sure why White sharks are missing. 

From 205 observations per year to … zero!

Between 2010 and 2016, observers recorded an average of 205 annual observations of white sharks off the beaches, focused on spring and summer. Although it is known that the species is migratory – females are able to migrate thousands of kilometres -, in 2018, the number of sightings dropped to 50 and finally, in 2019, the dramatic figure of zero.

One of the tourist attractions of the region consists of boat trips or cage dives to observe the Great Whites. But the boats that take tourists to watch sharks hunt seals at Seal Island, in the middle of False Bay, have not recorded sightings either. However, during these experiments, customers used to observe several individuals and up to 30 seals predations per day….

There is also no evidence of predation on the carcasses of stranded whales, which were regularly removed from the coast by the municipal authorities : White shark bite marks have been missing from whale carcasses floating in the bay since 2018.

So, what are the assumptions?

None of the hypotheses put forward by the scientists are privileged at this time. One of them would be the attacks of Orcas, more and more frequent on the Great Whites of the region. For several years, a new group of Orcas who came to the Bay would have developed a particular taste for… the liver of a Great White shark.

Hypothesis number 1: Orcas ?

Data show that White shark sightings have dropped significantly in False Bay since 2015 when two Orcas (Orcinus orca)—nicknamed Starboard and Port because their dorsal fins curl opposite ways—started to predate on a local colony of Sevengill sharks (Notorynchus cepedianus).

Several White sharks have been found dead up the South African coast with their livers missing, another telltale sign. Orcas are known to remove sharks’ livers—which are fatty and nutritious—with surgical precision, leaving the rest of the carcass behind. Scientists in Australia and California have also observed how shark-killing Orcas can cause white sharks to migrate out of an area.

Hypothesis number 2: men ?

Human activities are increasing as the population increases. Overfishing, which amounts to a lack of food for sharks, but also a significant threat to their survival, is an obvious cause. Unfortunately, ocean pollution is a global problem. False Bay is no exception to tourist development, which could also had played a role in the desertion of sharks, without however explaining the sudden decline in their numbers. So for now, the mystery remains. Especially now, another unknown fact adds to the picture: scientists still do not know what the consequences of the absence of Great White sharks will be on the ecosystem.

Source : article paru en septembre 2019 dans Siencemag