La Réunion condamne l’avenir des requins tigres
Une capture en baisse… mais toujours absurde
En mai 2025, 4 requins tigres ont été tués à La Réunion dans le cadre du programme de pêche « préventive ». Si le chiffre paraît en baisse, le contraste avec l’effort de pêche engagé est toujours saisissant. Ainsi, les pêcheurs ont utilisé 171 PAVAC (palangres à appâts vivants) sur 63 jours de pêche cumulés sur le mois, et probablement plus de 50000 euros de « subventions »… Le ratio est édifiant. Le coût écologique – et financier – reste disproportionné. Ces captures sont d’autant plus injustifiées que, depuis 2011, les requins tigres n’ont été impliqués que dans un seul accident recensé.
Des requins juvéniles, condamnés avant l’âge adulte
Autre point alarmant : les 4 requins tigres capturés étaient tous juvéniles, mesurant moins que la taille de maturité sexuelle (estimée entre 2,85 m et 3,45 m, soit vers l’âge de 10 ans). Autrement dit, des individus qui ne se sont même pas encore reproduits. Cette politique locale est une condamnation sans appel de l’avenir des populations océaniques de requins tigres, déjà fragilisées.
Un effort de pêche massif… en plein cœur de la réserve marine
La pêche préventive a commencé en 2012. Pour l’effort de pêche, on ne dispose des chiffres que depuis mars 2018. Et depuis, ce sont plus de 214 000 heures de pêche qui ont été cumulées, dont environ la moitié en plein cœur de la Réserve marine nationale de La Réunion. Et ce chiffre ne reflète pas l’effort réel : les heures de pêche hors cadre officiel ou les pratiques « amateurs » destructrices restent invisibles dans ces données, elles-mêmes sujettes à questionnement.
De fait, depuis le début de cette politique destructrice, 884 requins ciblés ont été tués au 31 mai 2025, dont 695 requins tigres, soit 97 % des deux espèces ciblées que sont les requins tigres et les requins bouledogues.
30 % des pêches sans observateurs
En effet, seuls 70 % des déclenchements de capture se sont faits en présence d’un assistant scientifique. Cela signifie que près d’un tiers des opérations échappent à tout regard extérieur, laissant aux pêcheurs une liberté totale pour choisir les lieux de pêche, déclarer ou non les prises, et évaluer l’état des animaux relâchés. Un manque de transparence inquiétant pour une opération aussi sensible, et financée avec de l’argent public.
Pendant que des élus dérapent
En parallèle de cette politique brutale contre les prédateurs marins, certains responsables locaux se croient tout permis. Le 15 mai 2025, Jean-François Nativel est arrêté par la police. Figure de l’anti-requin qui a sû surfé jusqu’au rôle d’élu local, improbable président de la commission régionale environnementale, professeur… Il a été intercepté pour conduite en état d’ivresse avec 1,4 g d’alcool par litre de sang, défaut de maîtrise et accident de la route. Ironique, pour celui qui, moraliste et donneur de leçons, prétend défendre la sécurité à tout prix. Cela écorne encore un peu plus la crédibilité de ceux qui prônent la « sécurité » tout en cultivant l’irresponsabilité. Un coup dur pour l’image du défenseur auto-proclamé de la sécurité des Réunionnais.
Une biodiversité sacrifiée pour masquer nos excès
Enfin, la chasse aux requins tigres s’apparente de plus en plus à une politique de bouc émissaire écologique, destinée à rassurer plutôt qu’à protéger. Pendant que des élus prônent la « tolérance zéro » pour les prédateurs marins, on détourne l’attention d’enjeux bien plus graves : disparition d’espèces clés pour l’écosystème, perte de biodiversité côtière, artificialisation des littoraux, pollution des eaux, surpêche…et chasse aux subventions européennes.
On détourne l’attention avec des statistiques faussées de captures et des campagnes anxiogènes.
Combien de temps encore allons-nous sacrifier nos écosystèmes pour des décisions fondées sur la peur, l’ignorance… ou l’égo ? Les requins ne sont pas nos ennemis. Ils sont les garants silencieux d’un équilibre fragile, qu’il est urgent de protéger – avec intelligence, transparence… et sobriété.