Une nouvelle approche pour l’étude des raies et des requins

Les espèces de poissons cartilagineux ou Chondrichtyens, – raies, requins et chimères -, sont grandement menacés de disparition dans tous les océans. Ces espèces sont encore mystérieuses pour un grand nombre. L’UICN reconnait qu’elles ont été insuffisamment prises en compte dans la conception des Aires Marines Protégées (AMP). C’est pourquoi l’UICN a mis en place une nouvelle approche pour l’étude des raies et des requins. Ce travail de recherche collaboratif réalisé par des scientifiques s’intitule « Important Sharks & Rays Area » ou ISRA.

Objectifs des ISRA

Les « Régions Importantes pour les Requins & les Raies » (ISRA) permettent d’identifier les zones d’importance pour ces espèces marines. « Importance » signifie qu’un site est reconnu pour sa diversité en espèces de poissons cartilagineux, ou pour une population particulière. À la différence des AMP qui sont déterminées généralement par un espace défini, avec des réglementations et des contrôles dépendants d’un pays (parfois plusieurs). La création d’une AMP pourrait être une recommandation à mettre en œuvre suite à l’étude ISRA sur une région donnée du globe.

De fait, les critères scientifiques de cette étude devraient permettre de mieux comprendre les cycles biologiques et les comportements, et d’identifier plus précisément les lieux fréquentés par ces poissons. Idéalement, les scientifiques pourraient expliquer les raisons de leur présence sur certains sites et également établir leurs niveaux de vulnérabilité. In fine, on espère que ces connaissances nouvelles permettront de mieux les protéger.

Quels critères déterminent une ISRA ?

Les critères ISRA ont été élaborés par des scientifiques, des agences de conservation et des organismes gouvernementaux. Il y a quatre critères principaux pour identifier une zone ISRA. Le critère A concerne la vulnérabilité de l’espèce, quand elle est connue. En plus de ce critère commun à toutes les zones ISRA, au moins un autre critère doit être présent :

  • Critère B : une aire de répartition naturelle restreinte ; cela signifie que plus l’aire de répartition naturelle d’une espèce est « petite », plus les impacts négatifs sur la zone sont susceptibles de menacer les populations.
  • Critère C : leur écologie, soit les besoins biologiques et écologiques des requins, avec les habitats spécifiques soutenant leurs fonctions vitales. Il s’agit des sites de reproduction, d’alimentation, de repos, des couloirs de déplacements, des lieux connus de rassemblements.
  • Critère D : les attributs spéciaux. Par exemple, la diversité des espèces dans une région précise est un critère considéré. Un autre caractère distinctif est une zone abritant des animaux présentant des caractéristiques biologiques, comportementales ou écologiques distinctes d’une autre zone pour la même espèce.

Le choix d’une approche géographique

Actuellement, les experts ont identifié 125 ISRA à travers les différents océans et mers du monde. La liste évolue en fonction des recherches, des découvertes et des connaissances acquises.

Cette approche de conservation basée sur des critères géographiques n’est pas nouvelle en soi. On l’utilise déjà pour les mammifères marins (IMMA), les oiseaux (IBA) et la biodiversité (KBA). Les scientifiques pensent qu’elle peut jouer un rôle essentiel dans la préservation des poissons cartilagineux, en protégeant notamment de la pêche et des modifications d’habitat les sites identifiés comme essentiels.

Un outil décisionnel ?

Une fois de plus, il s’agit d’attirer l’attention des décideurs politiques et de les alerter sur la vulnérabilité croissante de ces espèces mal connues. Ces zones spécifiques devraient permettre l’identification des régions sur lesquelles porter prioritairement les efforts de conservation. Il reste à espérer que les conclusions seront entendues et les mesures de gestion appropriées mises en œuvre.