Les requins-baleines peuvent-ils vivre en aquarium ?

Un requin-baleine libre à Nosy Be! Cette espèce pélagique ne doit pas vivre en aquarium. © Fabien Degrigny

Un aquarium est-il un lieu pour les requins baleines, espèce pélagique par excellence ? Au Georgia Aquarium d’Atlanta, c »est le 4ème requin-baleine qui décède. Il s’agit d’Alice, jeune requin-baleine, morte en juin 2021. Les responsables de l’aquarium disent avoir remarqué un changement dans son comportement, ainsi que dans ses analyses sanguines. Puis son état s’est brusquement aggravé. Les responsables de l’aquarium ont finalement décidé d’euthanasier Alice. Selon eux, c’était « la seule chose humaine à faire ». C’est le 2ème requin-baleine euthanasié dans cet aquarium.

Alice, Trixie, Ralph, Norton, arrivés entre 2006 et 2007, sont morts

Capturée à Taïwan, Alice était « destinée à être vendue à un marché de fruits de mer » selon le porte-parole de l’aquarium. Alice a donc été « sauvée » (!) et « envoyée » au Georgia Aquarium. Le décès d’Alice survient après celui de Trixie le 27 novembre 2020. Les deux femelles étaient arrivées à l’aquarium en 2006.

Elles avaient rejoints deux requins-baleines mâles détenus depuis l’ouverture de l’aquarium en 2005, arrivés également de Taïwan. Ces derniers sont décédés en 2007. 

Certains experts pensent que ces décès seraient dus au Trichlorfon, un produit chimique anti-parasitaire utilisé pour traiter les bassins d’aquarium. Suite à l’utilisation de ce produit, les deux mâles avaient cessés de s’alimenter. 

Selon l’autopsie menée par Robert Hueter, scientifique principal et directeur du Centre de recherche sur les requins au Mote Marine Laboratory à Sarasota (Floride), Ralph avait été nourri de force par intubation pendant plusieurs mois. Cette pratique a pu percer son estomac et provoqué la péritonite qui a conduit à son décès le 11 janvier 2007. Quant à Norton, l’aquarium l’a euthanasié le 13 juin 2007 après qu’il a cessé de s’alimenter et qu’il s’est laissé glisser au fond de son bassin… 

Pourtant, dans la nature, ces animaux vivent bien plus longtemps ; à 14 ans, Alice était à peine adulte…

Un bon business : la nage garantie avec des requins-baleines

Tarako et Yushan ont remplacé Ralph et Norton, deux mâles arrivés de Taiwan, début juillet 2007, soit à peine deux semaines après le décès de Norton. Ils sont encore vivants. On est en mesure de se demander pour combien de temps ?

Le Georgia Aquarium est l’un des seuls aquariums hors d’Asie à détenir des requins-baleines. L’aquarium propose à ses visiteurs d’expérimenter la nage « garantie » avec des requins-baleines. Pour la modique somme de 190 US$ à 235 US$ par personne, le visiteur peut passer 30 minutes dans l’eau avec requins baleines et raies manta. En moyenne, ce sont 5000 nageurs qui, chaque année, partagent le bassin des requins-baleines. Cela fait un peu plus d’1 million de US$/an de revenus générés par la présence des géants…. Y a-t-il eu une étude d’impacts de ce public immergé sur la santé des animaux du bassin ? Probablement que non ; dans le cas contraire, nous n’en n’avons pas connaissance.

Taïwan, plaque-tournante du commerce des requins

Il est certain que tout aquarium qui veut présenter des requins-baleines devra regarder vers Taïwan.

En effet, Taiwan est le premier producteur et consommateur de viande de requin de la planète (50 000 tonnes par an). La pêche du requin-baleine à Taïwan remonte aux années 1970. Sa chair blanche lui a valu le surnom de « requin-tofu ». Il est devenu l’un des mets les plus recherchés de la gastronomie taïwanaise. Néanmoins, depuis début 2008, Taïwan a introduit « une interdiction totale de capture et de vente de requins-baleines et de viande de requin-baleine ». Toutefois, malgré ces efforts, la pêche de l’animal reste tolérée officieusement. Une partie considérable de la viande de requin-baleine consommée à Taïpei est importée illégalement de Chine, des Philippines, d’Indonésie et d’Inde.

Menaces sur l’espèce

La population de requins-baleines a considérablement diminué au cours des dernières décennies. La pêche excessive est l’un des facteurs qui va mener à la disparition de l’espèce, d’autant plus que les quotas imposés sont peu respectés. Il est pêché pour sa viande, mais aussi pour sa graisse qui sert à la fabrication d’huile, et bien sûr, pour ses ailerons, ou encore pour la captivité.

Les autres causes de la disparition de l’espèce sont essentiellement la destruction de son habitat, la prise dans les filets de pêche actifs ou fantômes (=filets perdus ou abandonnés dérivant au gré des courant) , les collisions avec des navires. Le requin-baleine est classé « en danger » d’extinction par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) depuis 2016.

L’aquarium d’Atlanta, un projet récent au concept démodé

En novembre 2001, Bernard Marcus, homme d’affaires milliardaire, annonça son idée de bâtir un aquarium comme cadeau à la ville d’Atlanta, qui encouragerait une croissance économique et un enrichissement culturel. Marcus et son épouse Billi visitent 56 aquariums dans 13 pays différents afin de rechercher et de concevoir une structure de ce type, ils donnent alors 250 millions de dollars pour financer la construction de l’aquarium de Géorgie. De nombreuses grandes entreprises telles que Home Depot, Coca-cola, Turner Broadcasting, UPS, AirTran Airways, AT&T, Georgia-Pacific, Time Warner, SunTrust et Southern Company ont donné 40 millions de dollars de plus. Leur dons ont permis à l’aquarium d’ouvrir en 2005 sans avoir de dettes. Les poissons ont été transportés de Taïwan à l’aquarium par UPS dans 42 bassins à bord d’un avion MD-11. UPS a donné à l’Aquarium le montant des frais de livraison, estimé à plus de 200 000 dollars (Source : Wikipedia).

Il n’y a pas d’information sur le prix payé à Taïwan pour l’achat de chacun de ces requins-baleines, ni pour les autres raies manta, bélugas, grands dauphins…où comment faire baisser son imposition fiscale en tuant la faune sauvage… mais ce serait l’objet d’un autre article….